1) Pourquoi la guerre de Corée est une guerre dont on parle peu ? Quelle est la chronologie des événements ?
C’est une guerre méconnue car la France de 1950 a des soucis de politique intérieure (chute des gouvernements George Bildault, puis Henri Queuille, début du gouvernement René Pleven). Elle est aussi en pleine reconstruction : la France est déjà engagée militairement en Indochine.
Enfin, en cette période de reconstruction d’après la deuxième guerre mondiale, les crises asiatiques sont politiques, bien éloignées des préoccupations de la société française de l’époque.
Il y a de plus une méconnaissance géographique de la Corée. Et puis les hommes qui vont aller se battre sont tous des volontaires, civils et militaires, ces derniers quittant même leur unité pour se battre en Corée, et beaucoup d’entre eux sont d’anciens militaires qui ont combattu pour la France libre ! Ils décident de répondre à l’appel de l’organisation des Nations Unies.
Pour la petite histoire et pour vous faire comprendre la trempe de ces hommes, voici une anecdote :
“Le général de corps d’armée (4 étoiles) MONCLAR (nom de guerre) de son vrai nom Magrin Vernerey commandait la légion étrangère Pousse qui sera à l’origine du bataillon français en Corée. Le general MONCLAR se porte donc volontaire, pour le diriger, mais dut accepté d’être rétrogradé au grade de lieutenant-colonel pour la durée de la guerre. Pour cela, ayant dépassé la limite d’âge pour ce grade, le général dû avoir une dérogation ministérielle spéciale pour redevenir lieutenant-colonel !”
La situation internationale à cette époque est très complexe : la Corée est sous occupation japonaise jusqu’en 1945. A la fin de la seconde guerre mondiale, les états unis et l’union soviétique doivent désarmer les forces japonaises installées en corée, et le choix du 38eme parallèle, comme délimitation des zones d’action américaine et soviétique est un choix purement pratique et arbitraire.
Les Etats-Unis s’occupent du sud de la Corée et l’Union Soviétique du nord !
Entre 1946 et 1950, les Etats-Unis et les Soviétiques alliés lors de la seconde guerre mondiale, deviennent progressivement adversaires lors de la guerre froide.
Cet état de fait favorise en 1948 la pérennité de la division de la péninsule coréenne et l’émergence de part et d’autres du 38ème parallèle de deux systèmes politiques opposés calqués sur les modèles américain et soviétique.
Au début de l’année 1950, il n’y a plus guère de présence américaine au sud de la Corée, car elle s’est repliée au Japon.
Kim Il Sung qui souhaite réunifier le pays obtient l’aval des Soviétiques et passe à l’offensive le 25 juin 1950. Ce jour-là, les Nord-Coréens, appelés les « rouges », franchissent le 38ème parallèle. Ils ne rencontrent aucune résistance et deux mois plus tard ils occupent la quasi-totalité du pays : seule la région de Pusan (le grand port du Sud) résiste aux « rouges » qui ne peuvent passer la rivière Naktong sur les berges de laquelle les forces sud-coréennes résistent héroïquement.
L’organisation des Nations Unies condamne cette agression brutale et accepte la proposition des Etats-Unis de créer une « Coalition » dont le général Mac Arthur alors basé avec ses troupes au Japon, prendra le commandement.
En septembre 1950 c’est le début de la Contre-attaque de la « Coalition » avec le débarquement sur deux fronts : Pusan et Inchon (Nord ouest de la Corée du Sud)
Les Nord-coréens sont alors confrontés à une véritable arinée, cette fois ci menée de main de maître par le Général Mac Arthur.
En novembre 1950, les troupes de la « coalition » sont sur la frontière chinoise au nord de la Corée et provoque la Chine qui entre dans ce conflit international. La Chine craint que les Etats-Unis ne battent la Corée du Nord et profitent de l’occasion pour pénétrer en Chine, où les Communistes ont pris le pouvoir en 1949.
Le front se stabilise à nouveau durant l’été 1951.
Les deux camps ennemis décident d’entraîner des pourparlers d’armistice, car pour les deux camps, on se rend compte qu’il n’y aura plus de gains militaires substantiels autres à obtenir désormais !
Il y aura eu donc un an de guerre totale et deux ans en alternance de « combats et de négociations » d’armistice.
Au demeurant 40% des pertes humaines seront à déplorer durant ces deux années de drôle de guerre.
Le bilan humain des pertes humaines de la guerre de Corée est considérable : plus de 200.000 morts pour la coalition des Nations Unies et près de 800.000 morts pour les forces nord-coréennes et chinoises (les rouges).
En outre un lourd tribut a été payé par la population civile sud-coréenne, près d’un million de victimes (femmes, enfants…)
2) Qu’en est-il du bataillon français ?
Le bataillon français est arrivé en Corée le 29 novembre 1950 à Pusan, puis il a été transféré à Suwon, équipé et intégré au 23ème régiment de la 2ème division de l’infanterie américaine.
Cette division qui est toujours présente en Corée à l’heure actuelle a un autre lien particulier avec la France : elle a été créée sur le sol de notre pays en 1917 !
En plus des hommes, la France a envoyé l’un de ses bateaux : « l’Aviso la Grandière » qui, dès juillet 1950, a été utilisé pour des missions de transport et d’escorte de convois entre le Japon et Pusan. L’équipage français du bâtiment a été plus tard décoré de la « Korean War Service Medal ».
Les faits d’armes des hommes du bataillon français commandé par le général Monclar sont nombreux et ils ont permis au bataillon de se forger très tôt une réputation d’unité d’élite : du 7 au 12 janvier 1951, les français participent à la bataille de Wonju et stoppent par une charge à la baïonnette l’avancée des Chinois. Il y aura ensuite les combats des « Twin Tunnels », ainsi le bataillon français résistera pendant trois jours aux assauts de quatre divisions chinoises permettant ainsi une contre offensive victorieuse de la 8ème armée.
C’est à l’issue de ce premier engagement meurtrier que le général Monclar déclara à ses hommes qu’ils étaient désormais « prisonniers de leur gloire ». Fin février – début mars, il y aura la conquête du Piton 1037 qui permettra l’ouverture de la route du 38ème parallèle. Il faut noter que durant le conflit,la Corée a connu des hivers qui comptent parmi les plus froids de son histoire (-20 degrés en mars 1951).
Au printemps 1951, le bataillon franchit le 38ème parallèle dans la région d’Hwachon. Durant l’automne 1951, les Français s’illustreront encore lors de la bataille de « Crêvecoeur ».
A l’automne 1952 le bataillon français arrêta à Chongwon en Corée du Nord une offensive chinoise qui prenait la direction de Séoul.
C’est à ce moment là que le Président des Etats-Unis décernera aux forces françaises une quatrième citation. Juin 1953 verra la signature de l’armistice. Sur un effectif total de 3.000 hommes sur une période de trois ans, le bataillon français en aura perdu 263 : ce qui représente une perte d’environ 10%, qui est la plus importante perte parmi les contingents étrangers.
44 soldats français sont enterrés au cimetière des Nations Unies de Pusan, il s’agit du seul cimetière militaire étranger sur le sol coréen.
La France dispose, comme tout pays de la coalition, d’un monument dédié aux morts français pendant la guerre. Il se trouve sur la route de Suwon.
De plus, fait inhabituel, notre pays bénéficie également de l’hommage exceptionnel rendu par population coréenne à un médecin français. En effet, seuls deux hommes « étrangers » ont un monument qui leur est spécifiquement dédié : le général Mac Arthur, dont le monument est à Inchon, et le commandant Jean Louis, médecin qui sauta sur une mine en voulant secourir un blessé coréen, dont le monument est à Hongcheon.
A la fin de la guerre, le bataillon a été transformé en une unité régulière et envoyé en Indochine puis en Algérie pour ensuite être dissout complètement.
3) Quelle est la place de la guerre de Corée dans l’histoire ?
La guerre de Corée a été un conflit qui a consacré le début de la Guerre Froide et la lutte du Bloc Capitaliste contre le Bloc Communiste. Cette guerre a été la première mission de maintien de la paix par l’Onu.
Bibliographie
- « Corée 1950-1953 – l’héroïque bataillon français » de Jacques Vernet et Pierre Ferrari, aux éditions Lavanzelle
- « La guerre de Corée, 1950-1953 – guerre froide en Asie orientale » de Patrick Souty aux Presses Universitaires de Lyon